vendredi 10 juin 2011

Lettre de L'ESPER du mois de juin 2011

Résistances
Ces dernières semaines, plusieurs mouvements de résistance sont venus nous interpeller.
Resistance des « indignés » espagnols tout d’abord, un mouvement spontané qui s’est développé face
à l’insupportable précarité qui se propage, face au chômage désormais horizon indépassable pour de
nombreux jeunes. Il est l’expression d’une lassitude générale de ne plus pouvoir espérer, mais il est
également un mouvement de défiance, non pas vis-à-vis du vote et de la démocratie représentative,
mais par rapport aux grands partis traditionnels. Ceci doit d’ailleurs nous questionner quant à la capacité
des « institutions » à représenter les citoyens : cela vaut pour les partis politiques, mais cela ne vaudrat-
il pas également pour les institutions de l’Economie sociale ? A nous d’être vigilants sur ce point, sur
lequel nous reviendrons.
Résistances qui se poursuivent, au-delà de l’Espagne, dans les pays arabes : alors que des peuples
ont triomphalement réussi, il y a quelques mois déjà, à gagner leur liberté, d’autres se battent encore
aujourd’hui, dans la poudre et le sang, pour conquérir la leur, simplement au nom de leur dignité.
Résistances plus près de nous, en France, dans les écoles par exemple, où parents d’élèves, enseignants et
acteurs éducatifs conduisent une impressionnante mobilisation citoyenne : nuit des écoles, mobilisations
quotidiennes dans les classes et les établissements, interpellation des pouvoirs publics… Là encore, une
belle leçon de citoyenneté, une action solidaire mise en oeuvre collectivement pour la réussite de tous
les élèves. Résistances également des fonctionnaires, dont ceux de l’Education, qui se mobilisent pour
la défense de leur pouvoir d’achat, de leurs conditions de travail, quand le gouvernement continue à se
cacher derrière le dogme du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux pour ne pas voir que le
système, dans l’Education comme dans d’autres services publics, est à bout de souffle.
Ces actes de résistance sont autant d’occasions d’espoir ; mais nous savons que résister ne suffira pas, et
qu’il faudra aussi créer, inventer, si l’on veut mettre en place un monde nouveau.
Quelle est donc, dans tout cela, la place de l’Economie sociale?
Au moment où se réunissent, en ce mois de juin, des Etats généraux au Palais Brongniart, la question
mérite légitimement d’être posée.
Il semble tout d’abord essentiel pour l’Economie sociale de s’interroger sur ses pratiques, sur ses modes
de gouvernance - comme nous avons commencé à le faire au sein de L’ESPER lors de notre dernière
AG -, sa capacité à incarner un espace d’émancipation, de citoyenneté et de démocratie réelle dans la
sphère économique, au moment où les attentes sur cette question, comme le montre le mouvement
espagnol, sont très fortes, et ont été tellement déçues.
Il parait ensuite indispensable que l’Economie sociale réaffirme son identité et sa capacité à porter un projet
politique, à un moment où se développent en parallèle différents mouvements qui attirent l’attention et
peuvent générer confusions et brouillages quant à ce qu’est réellement l’Economie sociale : au sein du
La Lettre de L’ESPER n°7 – Juin 2011 2
capitalisme, mouvements qui disent se constituer pour tenter de le « moraliser » ou tout du moins de
le réguler, comme l’entrepreneuriat social ; diffusion dans toutes les entreprises des logiques de RSE
(Responsabilité Sociale des Entreprises)… Mais aussi, plus cyniques, groupes du CAC 40 qui « surfent »
sur la demande de « social » et « d’éthique » pour se valoriser à travers une communication qui n’a guère
à voir avec leurs pratiques…
Dans ce contexte, plus que jamais, l’Economie sociale doit rester vigilante à ne pas être assimilée à
ces mouvements, qui se distinguent de sa définition et de son identité, qu’il lui faut donc fortement
réaffirmer : une économie non capitaliste ou a-capitaliste, constituée de sociétés de personnes et non
de capitaux, dans une démarche d’entreprenariat collectif. Et mieux dessiner son projet pour une autre
société : comment les solutions portées par l’Economie sociale peuvent-elles y contribuer ?
Car il ne s’agira pas simplement de se contenter de vouloir poser quelques pansements sur une société
où explosent les inégalités sociales, où notre avenir collectif est menacé par l’incapacité du système
actuel à se réguler. Il y a bien un monde nouveau à inventer. L’ESPER et ses organisations membres,
l’Economie sociale dans le monde de l’Education, devront y prendre toute leur part, en faisant entendre
leur voix dans le débat public.

Vous pouvez demander la suite de ce document par mail auprès de la FCPE Oise à fcpe.oise60@orange.fr

Aucun commentaire: